Évocation n° 09 - Le carrelage et la page
Objets sur socle blanc, texte encadré - 2016
Objets sur socle blanc, texte encadré - 2016
Texte de la proposition :
Le carrelage et la page
Deux objets sont posés sur un socle d'exposition : un carreau de carrelage et un morceau de papier jauni. Le morceau de carrelage est en très bon état, on pourrait le considérer comme neuf. Seul un éclat sur un de ses angles peut être remarqué. Sa couleur est un mélange de beige et de gris, moucheté, si le terme est bien approprié, avec des petits points noirs, répartis de manière aléatoire sur l'ensemble. La feuille de papier jauni, par les dimensions de sa hauteur et de sa largeur, ressemble à une page de livre de poche, livre ancien et jauni par le temps. La feuille de papier est située sous le carreau de carrelage, compressée entre ce dernier et la surface du socle, et deux de ses côtés dépassent de dessous le carreau. Les deux objets, posés sur la surface du socle, composent une proposition précise. Le carreau n'est pas posé au centre de la surface du socle. Il est ajusté sur deux de ses côtés, à, à peu près, un centimètre du bord. Le carreau et la surface blanche sont carrés. Deux des angles du carreau s'alignent sur l'une des diagonales de la surface. La page de papier, par l'un de ses angles, suit cet alignement. Les bords visibles de sa surface, parallèles aux bords du carreau, et du socle, respectent, eux aussi, environ un centimètre. Puisqu'il n'est pas ajusté, positionné au centre du socle, le carreau n'est peut-être pas un objet présenté sur un socle, mais un élément, un matériau qui participe à une composition, tout comme la page du livre. La surface du socle serait le troisième élément de cette composition.
La composition semble maîtrisée, ajustée avec soin, avec ordre. Il y a une idée de « bien rangé », de raisonnable, de rassurant qui émane de la proposition. Les couleurs crème, jauni et blanche renforcent par ailleurs cette douceur, cette harmonie. On est loin du champ lexical de l' « agressif », de l' « éclatant ». Peut-être le papier jauni, usé par le temps, impulse t-il cette ambiance ancienne, « désuète » pourrait-on dire, que la composition m'évoque : évocation de la lecture, du vieux livre, de la bibliothèque constituée depuis plusieurs années, plusieurs décennies... . Le carreau de carrelage participe à cette impression : carrelage de maison ancienne.
Ces deux objets pourraient avoir été prélevés dans la maison , dans le « chez soi » de quelqu'un. Ils évoquent quelque-chose de personnel et non public. Une certaine intimité est évoquée par le carreau : l'intimité de la salle de bain, de cette pièce que l'on verrouille, que l'on clôt pour préserver son intimité, se mettre à nu, ne pas offrir, partager la vue de son corps, de son sexe. Intimité de la lecture peut-être aussi, pratique solitaire. Quel pourrait être ce livre dont est extraite cette page ? Qui pourrait en être l'auteur ? La page est glissée soigneusement sous le carreau, les écrits cachés, dissimulés aux yeux des spectateurs. Quelles sont ces pensées, ces idées que l'on ne veut divulguer, ces lectures que l'on souhaite garder pour soi ? Choix personnels d'auteurs, discours et opinions politiques, écrits réprouvés, écrits érotiques, peut-être pornographiques... Sous son apparence minimaliste, cette composition peut peut-être se révéler érotique finalement, un érotisme conceptuel, platonique...
Le carreau de carrelage, dans ce contexte d'exposition, me fait penser aux propositions de Carl André, bien qu'il ne soit pas posé au sol, mais sur le socle d'exposition. La proposition feuille, carreau et surface de socle est très plane. Si l'on souhaitait donner un peu de hauteur à la proposition, on pourrait imaginer cet ensemble comme surface de réception d'un nouvel élément, élément qui pourrait expliquer, justifier la présence du carreau. Un savon me vient à l'esprit, pourquoi pas un savon, sculpté, taillé, façonné ? Peut-être un savon usé, trace d'un passé, relique du moment où il fut utilisé par une personne précise. Peut-être une éponge, sèche ou mouillée, avec un procédé propre à entretenir son niveau d'humidité. Peut-être encore des gouttes d'eau, elles aussi à conserver sur le carreau durant le temps de l'exposition. Cette surface pourrait aussi être le point d’impact d’un goutte-à-goutte qui tomberait à la verticale sur la faïence, éclaboussant plus ou moins les alentours selon la hauteur de la chute. Un jouet de bain pour enfant pourrait aussi venir altérer le minimalisme de la proposition... Cette proposition ne m'évoque pas grand chose finalement, sinon une grande rigueur formelle, froide, comme le carrelage sous le pied nu en hiver.
Le carrelage et la page
Deux objets sont posés sur un socle d'exposition : un carreau de carrelage et un morceau de papier jauni. Le morceau de carrelage est en très bon état, on pourrait le considérer comme neuf. Seul un éclat sur un de ses angles peut être remarqué. Sa couleur est un mélange de beige et de gris, moucheté, si le terme est bien approprié, avec des petits points noirs, répartis de manière aléatoire sur l'ensemble. La feuille de papier jauni, par les dimensions de sa hauteur et de sa largeur, ressemble à une page de livre de poche, livre ancien et jauni par le temps. La feuille de papier est située sous le carreau de carrelage, compressée entre ce dernier et la surface du socle, et deux de ses côtés dépassent de dessous le carreau. Les deux objets, posés sur la surface du socle, composent une proposition précise. Le carreau n'est pas posé au centre de la surface du socle. Il est ajusté sur deux de ses côtés, à, à peu près, un centimètre du bord. Le carreau et la surface blanche sont carrés. Deux des angles du carreau s'alignent sur l'une des diagonales de la surface. La page de papier, par l'un de ses angles, suit cet alignement. Les bords visibles de sa surface, parallèles aux bords du carreau, et du socle, respectent, eux aussi, environ un centimètre. Puisqu'il n'est pas ajusté, positionné au centre du socle, le carreau n'est peut-être pas un objet présenté sur un socle, mais un élément, un matériau qui participe à une composition, tout comme la page du livre. La surface du socle serait le troisième élément de cette composition.
La composition semble maîtrisée, ajustée avec soin, avec ordre. Il y a une idée de « bien rangé », de raisonnable, de rassurant qui émane de la proposition. Les couleurs crème, jauni et blanche renforcent par ailleurs cette douceur, cette harmonie. On est loin du champ lexical de l' « agressif », de l' « éclatant ». Peut-être le papier jauni, usé par le temps, impulse t-il cette ambiance ancienne, « désuète » pourrait-on dire, que la composition m'évoque : évocation de la lecture, du vieux livre, de la bibliothèque constituée depuis plusieurs années, plusieurs décennies... . Le carreau de carrelage participe à cette impression : carrelage de maison ancienne.
Ces deux objets pourraient avoir été prélevés dans la maison , dans le « chez soi » de quelqu'un. Ils évoquent quelque-chose de personnel et non public. Une certaine intimité est évoquée par le carreau : l'intimité de la salle de bain, de cette pièce que l'on verrouille, que l'on clôt pour préserver son intimité, se mettre à nu, ne pas offrir, partager la vue de son corps, de son sexe. Intimité de la lecture peut-être aussi, pratique solitaire. Quel pourrait être ce livre dont est extraite cette page ? Qui pourrait en être l'auteur ? La page est glissée soigneusement sous le carreau, les écrits cachés, dissimulés aux yeux des spectateurs. Quelles sont ces pensées, ces idées que l'on ne veut divulguer, ces lectures que l'on souhaite garder pour soi ? Choix personnels d'auteurs, discours et opinions politiques, écrits réprouvés, écrits érotiques, peut-être pornographiques... Sous son apparence minimaliste, cette composition peut peut-être se révéler érotique finalement, un érotisme conceptuel, platonique...
Le carreau de carrelage, dans ce contexte d'exposition, me fait penser aux propositions de Carl André, bien qu'il ne soit pas posé au sol, mais sur le socle d'exposition. La proposition feuille, carreau et surface de socle est très plane. Si l'on souhaitait donner un peu de hauteur à la proposition, on pourrait imaginer cet ensemble comme surface de réception d'un nouvel élément, élément qui pourrait expliquer, justifier la présence du carreau. Un savon me vient à l'esprit, pourquoi pas un savon, sculpté, taillé, façonné ? Peut-être un savon usé, trace d'un passé, relique du moment où il fut utilisé par une personne précise. Peut-être une éponge, sèche ou mouillée, avec un procédé propre à entretenir son niveau d'humidité. Peut-être encore des gouttes d'eau, elles aussi à conserver sur le carreau durant le temps de l'exposition. Cette surface pourrait aussi être le point d’impact d’un goutte-à-goutte qui tomberait à la verticale sur la faïence, éclaboussant plus ou moins les alentours selon la hauteur de la chute. Un jouet de bain pour enfant pourrait aussi venir altérer le minimalisme de la proposition... Cette proposition ne m'évoque pas grand chose finalement, sinon une grande rigueur formelle, froide, comme le carrelage sous le pied nu en hiver.